Dans ses communications, Bercy a mis en avant les nombreux avantages du prélèvement à la source. Avec l’abandon de l’année de décalage sur le plan fiscal, le ministère a notamment insisté sur l’intérêt de la réforme pour ceux qui partent à la retraite (l’impôt s’adaptera plus rapidement à la nouvelle situation du contribuable).
Le cas des personnes qui entrent dans la vie active a en revanche été moins développé. Il faut dire que pour elles, la réforme sera nettement moins favorable.
Situation actuelle
Actuellement, les jeunes qui commencent à travailler bénéficient de l’année de décalage. Concrètement, ils ne paient qu’en N+1, l’impôt dû sur les revenus de leur première année d’activité.
En matière de trésorerie, cela offre un avantage évident. Les revenus perçus la première année ne subissent aucune ponction, donnant plus de latitude au jeune actif pour s’installer dans la vie.
Avec le prélèvement à la source, la situation ne sera plus la même car les revenus seront fiscalisés dès le départ. Le jeune actif n’ayant pas de taux d’imposition personnalisé, c’est le barème du taux neutre qui s’appliquera.
Cas des personnes non imposables
Pour les jeunes disposant d’un faible salaire de départ et n’étant par conséquent pas imposables, la réforme n’aura pas de conséquences néfastes.
Le taux neutre ne s’appliquera qu’à partir de 1.368 euros de salaire mensuel (net fiscal). Ainsi, une personne débutant son activité à 1.300 euros par mois ne subira aucun prélèvement à la source lors de sa première année d’activité.
Par rapport au cadre actuel, il n’y aura donc pas de changement. En revanche, ce ne sera pas le cas pour les jeunes salariés imposables.
Cas des personnes imposables
Pour y voir clair, prenons l’exemple d’un salarié commençant son activité avec 1.500 euros par mois. Actuellement, il ne doit rien régler la première année et commence à payer l’impôt l’année suivante (pour un montant de 311 euros). Ensuite, il paie chaque année l’impôt sur les revenus de l’année précédente (soit par tiers, soit par mensualités).
Avec le prélèvement à la source, ce jeune salarié sera prélevé dès la première année au taux neutre de 1,5%, soit 22 euro par mois. Son revenu disponible ne sera donc pas de 1.500 euros mais de 1.478 euros.
Dans cet exemple, le taux neutre (1,5%) et le taux réel d’imposition (1,7%) étant assez proches, il n’y aura pas de grosse régularisation l’année suivante. Mais dans certains cas, les jeunes salariés seront doublement pénalisés : ils paieront l’impôt dès la première année et seront de surcroît prélevés à un taux supérieur à celui de leur imposition réel.
Imaginons que notre salarié gagne 1.520 euros par mois. Son impôt réel sera de 354 euros (1,9%) et devrait en théorie correspondre à un prélèvement mensuel de 29 euros. Toutefois, le fisc n’ayant pas encore de données annuelles pour ce contribuable, il lui appliquera le taux neutre prévu au barème, soit 2,5%.
Conséquence, ce jeune salarié paiera chaque mois 38 euros d’impôt. Sur sa première année d’activité, il fera donc une avance d’impôt de 100 euros, qui ne lui sera remboursée que l’année suivante.
Un décalage qui ne se rattrapera qu’en fin de carrière
Bien entendu, le système actuel a un inconvénient majeur. L’année de leur départ à la retraite, les nouveaux retraités doivent payer l’impôt sur les revenus de leur dernière année d’activité, ce qui peut poser un problème en cas de chute des ressources et/ou de manque d’anticipation.
Avec le prélèvement à la source, ce décalage en fin de carrière sera supprimé. Mais on peut imaginer que beaucoup de jeunes salariés préfèreraient subir ce décalage en fin de cycle et bénéficier en retour d’une dispense de paiement de l’impôt lors de leur entrée dans la vie active.